Publication datée du : 19/04/2023

La news RH Thema - Le télétravail

La news Thema
"Le télétravail"
#4 — 19 avril 2023

 

Le télétravail, plus que jamais d'actualité et encore peu encadré, soulève de nombreuses questions. Sans prétendre à l’exhaustivité, cette news Thema recense les dernières décisions en la matière. Elle est préparée par nos équipes selon un calendrier adapté au rythme des actualités sociales.
 

Bonne lecture !

 

1

 Télétravail : prise en charge des frais

Frais de transports en commun

Pour faire face à l'augmentation du nombre de salariés qui ont fixé leur résidence principale en province lors de la crise sanitaire, des sociétés ont mis en place des modalités de remboursement des frais de transport en excluant les trajets Paris-province excédant quatre heures par jour aller-retour. 

Le Tribunal judiciaire de Paris a considéré que l’instauration d’un critère d'éloignement géographique entre la résidence habituelle et le lieu de travail des salariés, dans l'objectif de refuser le remboursement à une certaine catégorie de salariés, constituait une inégalité de traitement.

TJ Paris 05-07-2022 – 22/04735

Frais inhérents au télétravail

A compter du 16 mars 2020 (1er confinement), une entreprise avait placé l’ensemble de ses collaborateurs en télétravail. Seuls certains salariés avaient bénéficié d’une indemnisation à hauteur de 5 euros bruts par jour télétravaillé, en application d’un accord d’entreprise signé le 3 janvier 2020 qui avait donné lieu à la signature d’un avenant à leur contrat de travail antérieurement à l’instauration de l’état d’urgence.

Afin de ne pas indemniser les autres salariés pour les jours télétravaillés, l’employeur refusait systématiquement toutes les nouvelles demandes de signature d’un avenant de mise en place du télétravail régulier, tel que prévu par l’accord collectif et conditionnant l’accès à cette indemnisation.

Le Tribunal judiciaire a considéré que l’employeur, en instaurant cette différence de traitement, commettait un manquement à son obligation d’exécution de bonne foi. 

TJ Paris 28-9-2021 - 21/06097
 

2

 Télétravail et titres-restaurant

Selon l’URSSAF et le ministère du Travail, le télétravailleur doit bénéficier des titres-restaurant au même titre que les salariés travaillant dans les locaux de l’entreprise, sous réserve que les conditions de travail soient équivalentes.

Alors que le Tribunal judiciaire de Paris a jugé que les télétravailleurs ont droit aux titres-restaurant pour chaque jour travaillé durant lequel le repas est compris pendant leur horaire de travail journalier, le Tribunal judicaire de Nanterre s’y est opposé en retenant que l’objectif poursuivi par l’employeur en finançant ces titres est de permettre au salarié de faire face au surcoût lié à la restauration hors du domicile qui serait dans l’impossibilité de prendre son repas chez lui, ce qui n’est pas le cas, selon lui, des salariés en télétravail à domicile.

TJ Paris, 30/03/2021 - 20/09805  /  TJ Nanterre, 10/03/2021 n° 20/09616

Aux termes d’un jugement rendu le 16 septembre 2021, le Tribunal judicaire de Nanterre a maintenu sa position en jugeant que cette indemnité doit être versée aux travailleurs sur site car ils n’ont pas d’autres alternatives pour se restaurer, tandis que la fermeture de la cantine n’impacte pas les télétravailleurs. Les syndicats ont interjeté appel de la décision.

TJ Nanterre, 16/09/2021 n° 21/00569

3

Résiliation judiciaire et télétravail 

L’employeur qui a accepté pendant plusieurs années qu’un commercial télétravaille depuis son domicile situé loin de l’entreprise, ne peut pas lui imposer unilatéralement d’être présent au siège deux jours par semaine, sans modifier un élément essentiel de son contrat de travail, en bouleversant son organisation professionnelle et ses conditions de vie personnelle. 

Pour la Cour d’appel d’Orléans, ce changement, qui constitue une modification du contrat de travail, ne peut pas être unilatéralement décidé par l’employeur et justifie la résiliation judiciaire aux torts exclusifs de ce dernier, peu importe que le télétravail n’ait pas été, initialement, formalisé par un avenant contractuel en l’espèce. 

Cour d'appel d'Orléans, 7 décembre 2021, n° 19-01258

4

Obligation de reclassement en cas d’inaptitude et télétravail 

Dans une affaire où une salariée avait été déclarée inapte par le médecin du travail, l’employeur avait conclu à l’impossibilité de mettre en place le télétravail, ce mode d’organisation n’étant, selon lui, pas compatible avec un emploi de vendeuse à distance qui impliquait la préparation de commandes depuis le lieu de travail. 
 
En l'espèce, l'employeur s'était contenté de procéder par affirmation, sans produire de pièce de nature à justifier de l’impossibilité de mettre en place le télétravail : la Cour d’appel a jugé qu’il avait manqué à son obligation de reclassement de sorte que le licenciement devait être requalifié sans cause réelle et sérieuse.
 
CA Paris 18 mai 2022 n° 19/02933

Par ailleurs, les juges d'appel puis la Cour de cassation nous ont donné une nouvelle illustration de l'obligation de reclassement qui pèse sur l'employeur avec la possibilité, pour le médecin du travail, d'imposer un tel aménagement du travail, même en l'absence de télétravail dans l'entreprise.

La salariée (secrétaire médicale) contestait son licenciement au motif que son employeur ne lui avait proposé aucun poste de reclassement, alors même que le médecin du travail avait précisé qu'elle « pourrait occuper un poste administratif sans déplacement et à temps partiel (2 j/semaine) en télétravail avec aménagement du poste approprié ». De son côté, l’employeur avait considéré qu’il lui était impossible de proposer de poste de reclassement à la salariée dans la mesure où il n'existait aucun poste en télétravail au sein de l'entreprise et qu'une telle organisation était incompatible avec son activité (en raison notamment du secret médical). De ce fait, il avait licencié la salariée.

La Cour de cassation relevait toutefois que les missions de la salariée, non contestées par l'employeur, ne supposaient pas l'accès aux dossiers médicaux et étaient susceptibles d'être, pour l'essentiel, réalisées à domicile en télétravail et à temps partiel comme préconisé par le médecin du travail. Dès lors, l'employeur n'avait pas loyalement exécuté son obligation de reclassement.

Cass. soc 29 mars 2023, n° 21-15.472

De tels arrêts méritent toute notre attention compte tenu des difficultés déjà rencontrées par les employeurs dans le cadre de leurs recherches de postes de reclassement.

Nous vous invitons à lire notre interview, réalisée le 5 avril 2023 par le magazine Capital sur ce sujet, en cliquant ici.

5

Télétravail et durée du travail : quel est le régime de la charge de la preuve ?

Un salarié est décédé en 2014. A cette période, il travaillait 3 jours de télétravail au domicile / 2 jours sur site. Ses ayants droit ont engagé une action à l'encontre de son employeur afin de réclamer notamment des rappels de salaire au titre d'heures supplémentaires et des dommages et intérêts pour violation du droit au repos.  

Sur les heures supplémentaires : les juges d'appel ont débouté les ayants droit de leurs demandes, après avoir relevé notamment que les éléments présentés ne donnaient que "quelques exemples disséminés" des horaires, ne démontraient pas un travail continu et ne démontraient pas la réalisation d’horaires significatifs sur des durées systématiques. Sans surprise, la Cour de cassation rappelle qu'en matière de durée du travail, la charge de la preuve est répartie entre les deux parties de sorte que l'employeur devait répondre aux éléments suffisamment précis transmis par les ayants droit, y compris en cas de télétravail.

Sur le droit au repos : à cet égard, la Cour de cassation rappelle qu'il appartenait à l'employeur de prendre les mesures propres à assurer au salarié la possibilité d'exercer effectivement son droit à congé et au repos, et, en cas de contestation, de justifier "qu'il avait accompli à cette fin les diligences qui lui incombaient".

 Cass. Soc. 14 décembre 2022 n°21-18139

Pensez-y !

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