Publication datée du : 22/01/2025

La News RH #160

La news RH
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#160 — 22 janvier 2025

1

Menacer raisonnablement de réclamer des sommes non versées relève de la liberté d’expression ; le licenciement prononcé sur ce fondement est donc nul

Un salarié est convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement pour faute grave et mis à pied à titre conservatoire dans l’attente de la fin de la procédure. Il sollicite la résiliation judiciaire de son contrat de travail le jour de l’entretien préalable. Il est finalement licencié pour faute grave 12 jours après, notamment pour les motifs suivants : « mensonges sur votre situation contractuelle : il s'ajoute encore que lors de votre convocation à entretien préalable à un éventuel licenciement [...] vous nous avez déclaré que si nous mettions fin à votre contrat de travail, vous seriez en droit de réclamer vos commissions non versées depuis juin 2015. Vous avez réitéré cette menace dans le mail que vous nous avez adressé le 29 novembre 2017, veille de l'entretien, précisant que le montant dû était de près de 283 000 euros. Par là même vous vous êtes positionné de manière flagrante et incontestable en position de mensonge éhonté et vous avez délibérément choisi d'instaurer avec la société une forme de chantage ».
 
Le salarié a sollicité la nullité de son licenciement car il avait, selon lui, été prononcé en raison de l'exercice de sa liberté d'expression qui est une liberté fondamentale.
 
La Cour d’appel, suivie par la Cour de cassation, a jugé ce licenciement nul au motif que les allégations du salarié sur l'existence de commissions qui lui auraient été dues n'étaient ni injurieuses ni diffamatoires ni excessives et ne suffisaient pas à caractériser un abus de sa liberté d'expression, peu important qu'il n'en ait finalement pas sollicité le paiement devant la cour.
 
Le fait qu’il y ait eu d’autres motifs de licenciement ne pouvait pas avoir d’incidence sur la nullité du licenciement qui devait nécessairement être retenue.
 
A noter que dans le même arrêt, la Cour de cassation rappelle que lorsqu'un salarié demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail et la nullité de son licenciement au cours d'une même instance, le juge, qui constate la nullité du licenciement, ne peut faire droit à la demande de réintégration.
 

Cass. soc., 11 décembre 2024, n° 22-24.004, non publié

2

En cas de dispense d’activité de l’employeur durant le préavis, l’indemnité compensatrice doit intégrer la partie variable du salaire
 

Un salarié, licencié pour faute grave, a contesté son licenciement et donc sollicité le paiement d’une indemnité compensatrice de préavis.
 
La Cour d’appel n’a calculé le montant de cette indemnité que sur la base du salaire fixe du salarié, alors que ce dernier bénéficiait d’une rémunération variable en complément. Le salarié a donc saisi la Cour de cassation qui a pu rappeler plusieurs choses importantes en la matière :
  • lorsque le salarié n'exécute pas le préavis, il a droit, sauf s'il a commis une faute grave, à une indemnité compensatrice.
  • L'inexécution du préavis, notamment en cas de dispense par l'employeur, n'entraîne aucune diminution des salaires et avantages que le salarié aurait perçus s'il avait accompli son travail jusqu'à l'expiration du préavis, indemnité de congés payés comprise.
  • Lorsque la rémunération d’un salarié est composée d’une partie fixe et d’une partie variable, l’indemnité compensatrice de préavis doit prendre en compte ces deux parties.

 Cass. soc. 11 décembre 2024, n° 20-14057 FD

3

Une clause de mobilité doit toujours définir précisément son périmètre géographique
 

Une salariée d’une banque a signé un contrat de travail comportant une clause de mobilité rédigée dans les termes suivants : « mobilité professionnelle et géographique sur l'ensemble du réseau d'exploitation de la Lyonnaise de banque et de ses filiales ».
 
L’employeur a activé cette clause de mobilité à l’issue d’un arrêt de travail de la salariée. La salariée a refusé et a été licenciée.
 
La salariée a contesté ce licenciement en soutenant que la clause de mobilité était nulle car son champ géographique était imprécis.
 
La Cour d’appel a pourtant validé ce licenciement en retenant que la salariée savait pertinemment à quel territoire les termes « l'ensemble du réseau d'exploitation » faisaient référence, et ce compte tenu de ses fonctions, de ses compétences et de son niveau de responsabilité.
 
La Cour de cassation a logiquement désavoué la Cour d’appel en reprenant sa jurisprudence classique en la matière, c’est-à-dire en rappelant qu’une « clause de mobilité doit définir de façon précise sa zone géographique d'application et ne peut conférer à l'employeur le pouvoir d'en étendre unilatéralement la portée ».
 
En l’espèce, il est évident que les termes « l’ensemble du réseau d’exploitation » ne constituent pas une délimitation précise.
« Le département 69 », par exemple, aurait été une zone géographique précise, tout comme « la région Rhône Alpes » (qui comprend 12 départements).

 
Cass. soc. 18 décembre 2024, n° 23-13531 D

4

La non-reprise du paiement du salaire d’un salarié inapte justifie-t-elle une demande de résiliation judiciaire ?
 

A l’issue d’un arrêt de travail, une salariée est déclarée inapte à son poste. Un peu plus de six mois après, elle est licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement, étant précisé que l’employeur n’avait pas rémunéré la salariée durant toute cette période.
 
Préalablement, elle avait saisi le Conseil de prud’hommes en résiliation judiciaire de son contrat de travail, saisine qu’elle a ensuite complétée d’une contestation de son licenciement.
 
La demande de résiliation judiciaire de la salariée était fondée sur le fait que l'employeur n'avait pas repris, à l'expiration du délai d'un mois à compter de l'avis d'inaptitude de la salariée, le paiement de son salaire et ce jusqu'à la date du licenciement, la privant ainsi indûment, durant plus de six mois, d’une somme à caractère alimentaire.
 
La Cour d’appel n’avait étonnamment pas accepté cet argument.
 
La Cour de cassation, elle, invalide le licenciement en retenant que cette privation injustifiée de salaire durant plus de six mois constituait un manquement suffisamment grave pour justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l’employeur.
 
Cass. soc. 18 décembre 2024, n° 23-11507

5

L'ancien salarié qui viole une clause de non-concurrence perd son indemnité uniquement pour l’avenir
 

 Un salarié est licencié et voit sa clause de non-concurrence, d’une durée de deux ans, appliquée à compter de la date de rupture de son contrat.
 
Le salarié viole sa clause de non-concurrence quelques mois après la rupture de son contrat de travail.
 
La Cour d’appel et le Conseil de prud’hommes ont considéré que le salarié devait rembourser à l’employeur l’intégralité des sommes versées au titre de l’indemnité de non-concurrence, et ce dès la date de rupture du contrat de travail, donc même pour la période durant laquelle la clause de non-concurrence avait été respectée par le salarié.
 
Le salarié a contesté ces décisions en considérant qu’à tout le moins, le remboursement ne pouvait considérer la période antérieure au début de la violation de la clause de non-concurrence.
 
La Cour de cassation a censuré les juges du fond et donné raison au salarié en jugeant que « la perte du droit à l'indemnité de non-concurrence ne vaut que pour l'avenir et qu'à compter du jour où la violation de l'obligation de non-concurrence a été constatée ».
 
Cass. soc. 18 décembre 2024, n° 23-19381

[Interview]
Est-il possible d'imposer aux salariés de pointer ?

Maître Anne Leleu-Eté, Associée, a été interviewée par Capital Magazine au sujet des possibilités pour l’employeur de pointer ou badger en début et fin de journée.

Retrouvez l'interview ici.

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