Publication datée du : 27/03/2024

La News RH #122

La news RH
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#122 — 27 mars 2024

1
Changement du lieu de travail : simple changement des conditions de travail ou véritable modification du contrat nécessitant l’accord du salarié ? Nouvelles précisions de la Cour de cassation

En l'absence de clause fixant le lieu de travail ou de clause de mobilité dans le contrat de travail, et à condition que l'emploi n'implique pas en lui-même une certaine mobilité géographique, c’est le changement de secteur géographique qui va permettre de déterminer si le changement de lieu de travail constitue un simple changement des conditions de travail (ne nécessitant pas l’accord du salarié) ou une véritable modification du contrat de travail (nécessitant l’accord du salarié).
 
Pour déterminer s’il y a un changement de secteur géographique, et donc une véritable modification du contrat de travail, les juges doivent se baser sur un faisceau d’indices (jusqu’ici, le plus souvent l’identité du bassin d’emploi, la desserte par les transports publics, le réseau routier et les conditions de circulation).
 
Dans une affaire ayant donné lieu à un arrêt du 24 janvier 2024, la Cour de cassation a eu l’occasion d’ajouter un nouvel indice.

En l’espèce, une salariée a été licenciée pour avoir refusé de se rendre sur son nouveau lieu de travail, ce qu’elle ne pouvait pas faire selon l’entreprise qui considérait qu’il s’agissait d’un simple changement des conditions de travail. L’employeur avançait comme argument qu’une distance de 35 kilomètres seulement séparait les deux sites, que le trajet séparant les deux sites en voiture était de 36 minutes seulement, que les deux sites appartenaient au même département et dépendaient de la même chambre de commerce et d'industrie et enfin que les deux villes étaient toutes les deux reliées entre elles par des grands axes routiers et autoroutiers.
 
La Cour d’appel, approuvée par la Cour de cassation, a considéré qu’il ne s’agissait pas d’un simple changement des conditions des travail et que l’employeur aurait donc dû obtenir l’accord de la Salariée pour modifier son lieu de travail. Pour ce faire, elle a considéré que les deux sites n’étaient pas sur le même bassin d’emploi car distants de 35 kilomètres, que le covoiturage était difficile à mettre en œuvre, que l’employeur ne démontrait pas que les transports en commun étaient facilement accessibles entre les deux communes aux horaires de travail de la salariée, et que l'usage du véhicule personnel en matière de fatigue et de frais financiers générait, en raison des horaires et de la distance, des contraintes supplémentaires qui modifiaient les termes du contrat.
 
La fatigue et les frais financiers générés par l’usage du véhicule personnel sont donc des nouveaux critères permettant d’apprécier la nature du changement de lieu de travail, critères que la Cour de cassation valide.
 
Cass. soc. 24-1-2024 n° 22-19.752

2
Nouveauté SYNTEC : l’accord du 13 décembre 2022 relatif à l’organisation hybride du travail en entreprise applicable au sein de la branche est rendu obligatoire

Un arrêté du 20 février 2024 a étendu (donc rendu obligatoire pour tous les employeurs et tous les salariés compris dans le champ d'application de la convention collective SYNTEC) les stipulations de l'accord du 13 décembre 2022 relatif à l'organisation hybride du travail en entreprise, conclu dans le cadre de la convention collective nationale susvisée.
 
Le préambule de cet accord précise que les partenaires sociaux de la branche ont souhaité négocier un accord de branche relatif à l’organisation hybride du travail donnant les clés aux acteurs de l’entreprise pour s’approprier et développer ce nouveau mode de collaboration compte tenu du contexte croissant de recours au télétravail depuis 2020. Le préambule précise notamment que cet accord de branche a deux objectifs : le premier vise à donner un cadre aux salariés et aux entreprises qui mettent en place et expérimentent au quotidien le travail hybride ; le second vise à s’assurer de la protection des salariés bénéficiant d’une organisation hybride du travail tout en assurant la continuité d’activité de l’entreprise.
 
Cet accord est divisé en cinq thèmes :
- Thème 1 : organiser le travail hybride. Sont tout d’abord définis le travail hybride et toutes les formes de télétravail. Sont ensuite édictées un grand nombre d’obligations concernant la mise en place du télétravail (contenu de l’accord ou de la charte, formalisation individuelle, etc.), l’éligibilité, la réversibilité, le temps de travail, etc.
- Thème 2 : sécuriser le travail hybride. Différentes règles et obligations assurant la préservation de la santé et de la sécurité des salariés sont édictées, avec tout un volet sur la déconnexion, le contrôle du temps de travail et de la charge de travail.
- Thème 3 : accompagner. Différentes règles et obligations sont instituées concernant les équipements de travail, les frais professionnels, la formation, l’accompagnement des salariés en situation spécifique.
- Thème 4 : communiquer. Il traite du dialogue social.
- Thème 5 : stipulations finales. Il instaure notamment une exception temporaire de report de l’application de l’accord aux entreprises de moins de 50 salariés déjà dotées d’une charte de télétravail.
 
Cet accord comprend ensuite deux annexes :
Annexe 1 : « Modèle commenté d’accord d’entreprise ou de charte ».
Annexe 2 : « Guides de bonnes pratiques ».

Accord du 13 décembre 2022 relatif à l'organisation hybride du travail en entreprise
 

3
La rupture conventionnelle peut être convenue et signée le même jour

La rupture conventionnelle suit une procédure prévue par le code du travail qui, pour assurer au mieux la réalité du commun accord, impose un délai de réflexion et instaure un contrôle de l’administration.

Dans une affaire récente, une salariée demandait la nullité de la rupture conventionnelle qu’elle avait signée en soutenant que la signature du formulaire de rupture conventionnelle ne pouvait avoir lieu le même jour que l’entretien au cours duquel les parties se mettaient d’accord sur la rupture conventionnelle.
 
La Cour d’appel n’a pas suivi l’argumentation de la Salariée et la Cour de cassation a validé le raisonnement de la Cour d’appel.

Pour ce faire, la Cour de cassation énonce que l'article L. 1237-12 du code du travail n'instaure pas de délai entre, d'une part l'entretien au cours duquel les parties au contrat de travail conviennent de la rupture du contrat, et d'autre part la signature de la convention de rupture prévue à l'article L. 1237-11 du code du travail.
 
Elle en conclut logiquement qu’il n’y avait pas eu de vice de consentement en l’espèce dès lors que l'entretien avait eu lieu avant la signature de la convention de rupture, même si les deux évènements avaient eu lieu le même jour.
 
(Cass. Soc., 13 mars 2024, 22-10.551)

4
La mention de contrat aidé dans un CDD prime sur tout autre motif ajouté dans le même contrat

 
Dans une affaire récente, un salarié sollicitait la requalification de son contrat à durée déterminée (« CDD ») en contrat à durée indéterminée (CDI) au motif que son CDD mentionnait plusieurs cas de recours, à savoir dans le titre « Contrat de travail à durée déterminée CAE à temps partiel avec terme précis » et dans le corps du contrat « accroissement temporaire d’activité suite à une nouvelle activité ».
 
Selon le salarié, le second cas de recours mentionné était fictif et son CDD devait donc être requalifié en CDI.
 
La Cour d’appel, suivie par la Cour de cassation, n’a pas fait droit à la demande du salarié.
 
Pour prendre une telle décision, la Cour de cassation rappel tout d’abord qu’un contrat d'accompagnement dans l'emploi peut, par exception au régime de droit commun des contrats à durée déterminée, être contracté pour pourvoir un emploi lié à l'activité normale et permanente des collectivités, organismes, personnes morales et sociétés concernés.
 
Elle ajoute que la seule mention « contrat d'accompagnement dans l'emploi » suffit à satisfaire à l'exigence de définition du motif du contrat à durée déterminée prévue par le Code du travail.
 
En conséquence, elle considère que, lorsqu'en sus de la mention « contrat d'accompagnement dans l'emploi », un contrat de travail contient un des autres motifs de recours au CDD visés à l'article L. 1242-2 du code du travail, il y a lieu de retenir comme seul motif de recours celui relatif au contrat aidé.
 
(Cass. soc. 13-3-2024 no 22-20.031)

5

La validité du licenciement pour inaptitude à la suite d’un refus de poste de reclassement impliquant une baisse de rémunération

 

Dans cette affaire, à l’issue d’un arrêt de travail pour maladie, et à la suite d’une visite médicale de reprise effectuée par la médecine du travail, une salariée a été déclarée « inapte à son poste de travail et à tout poste à temps complet. Possibilité de reclassement à un poste à mi-temps sans station debout prolongée ni manutention manuelle de charges ».
 
Les représentants du personnel ont validé une offre de reclassement sur un poste de caissière à mi-temps et le médecin du travail a également donné son accord de principe à cette proposition.
 
La salariée a refusé cette proposition car elle impliquait une baisse de sa rémunération. Elle a été ensuite licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
 
La salariée a contesté son licenciement en soutenant que l’employeur n’avait pas respecté son obligation de reclassement.
 
Si la Cour d’appel a validé le raisonnement de la salariée en considérant que la salariée pouvait refuser cette proposition, ce n’est pas le cas de la Cour de cassation qui retient que l’employeur avait proposé à la salariée un poste conforme aux préconisations du médecin du travail.

Il faut donc retenir de cet arrêt que l'employeur peut respecter son obligation de reclassement en proposant un poste impliquant une baisse de rémunération pour le salarié.
 
(Cass. soc. 13-3-2024 no 22-18.758)

6.
Notre prochaine visioconférence : le forfait annuel en jours

Nous vous proposons de nous retrouver prochainement lors d'une visioconférence ayant pour thème le forfait annuel en jours, le 2 avril 2024 à 9 heures 30.
 
Comment mettre en place le forfait annuel en jours et réaliser un suivi effectif, quels sont les bons réflexes pour utiliser cet outil d'aménagement du temps de travail ? Comment limiter les risques contentieux et bien préparer son dossier ?
 
Nous aborderons ces différents points lors de cette visioconférence thématique et nous répondrons à vos questions lors de notre présentation.

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