Publication datée du : 27/10/2023

La News RH #103

La news RH
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#103 — 27 octobre 2023

1

Supplément de participation et d'intéressement :
 plus d'exonération de cotisations sans accord spécifique ?

Une entreprise avait fait l'objet d'un redressement par l'URSSAF au motif qu'elle avait versé des suppléments de participation et d'intéressement sans avoir conclu d'accord spécifique ou d'avenant à l'accord initial.

Par un arrêt du 19 octobre 2023 qui suscite de nombreuses interrogations, la Cour de cassation semble revenir à une appréciation très stricte des dispositions de l'article L.3324-9 du Code du travail et sur la tolérance administrative actuelle, laquelle permettait, jusqu'à présent, de prévoir le versement d'un supplément de participation ou d'intéressement par la voie unilatérale, quel que soit l'acte fondateur, dès lors que la répartition était faite comme prévu pour la prime initiale.

Elle juge que lorsque l'augmentation de la réserve spéciale de participation a été négociée par la voie collective, alors le supplément de participation doit faire l'objet d'un accord spécifique, lequel doit être déposé pour ouvrir droit aux exonérations. 

En ce qui concerne le supplément d'intéressement, la Cour de cassation semble prévoir un accord spécifique pour tous les cas où l'intéressement en lui-même a été mis en place par voie d'accord négocié (et non seulement suite à la négociation du supplément comme pour la participation). 

Les pratiques en la matière pourraient devoir être modifiées et il conviendra d'être vigilant aux prochains arrêts ou commentaires sur la question pour limiter les risques de redressement URSSAF. 

Cass. 2ème Civ, 19 octobre 2023, n°21-10.221

2

La dénonciation de faits de harcèlement concomitants au licenciement ne constitue pas toujours une cause de nullité

Une salariée avait dénoncé un harcèlement sexuel et avait été licenciée peu de temps après pour faute grave. Elle contestait ce dernier estimant qu’il était fondé sur un motif discriminatoire.

L’employeur soutenait que la lettre de licenciement contenait plusieurs griefs distincts justifiant à eux seuls le licenciement pour faute grave.

La Cour de cassation rappelle que lorsque la lettre de licenciement ne fait pas mention d'une dénonciation d'un harcèlement mais fait référence à des faits caractérisant une cause réelle et sérieuse, il appartient au salarié de démontrer que la rupture du contrat constitue une mesure de rétorsion à la suite d'une plainte pour harcèlement. Dans le cas contraire, il appartient à l’employeur de démontrer l’absence de lien entre la dénonciation par le salarié et son licenciement.

Dans le cas d’espèce, si les juges du fond avaient constaté que la lettre de licenciement ne faisait pas mention d’une dénonciation de faits de harcèlement, ils n’avaient pas recherché si les motifs énoncés par la lettre de licenciement pour caractériser la faute grave étaient établis par l’employeur et suffisaient ainsi à caractériser une cause réelle et sérieuse afin de déterminer sur laquelle des deux parties reposait la charge de la preuve.

En conséquence, la nullité du licenciement ne pouvait pas être prononcée.

Cass. Soc., 18 octobre 2023, n°22-18.678

3

Protection du salarié candidat aux élections 

  • Statut protecteur en l'absence de contestation de la candidature dans les délais

Pour mémoire, la candidature d’un salarié aux fonctions de représentant du personnel ne doit pas constituer une manœuvre frauduleuse visant à bénéficier de la protection individuelle accordée à ce titre. En cas de doute, l’employeur dispose d’un délai de 15 jours suivant l’élection pour contester celle-ci devant le tribunal judiciaire. (article R.2314-24 du Code du travail)

En l'espèce, un salarié avait informé son employeur de sa candidature aux élections professionnelles, par courrier du 16 février 2015, reçu le 18 février. Il avait été convoqué à un entretien préalable au licenciement le 19 février 2015 et avait été licencié pour faute grave le 10 mars 2015. Ce dernier contestait son licenciement, du fait de son statut protecteur.

Les juges du fond avaient considéré que le salarié ne pouvait pas revendiquer la protection en raison de la présentation de sa candidature peu de temps avant la rédaction du protocole d’accord préélectoral. Ils avaient également relevé que le salarié s'était déclaré candidat dans le seul but de se protéger avant une éventuelle rupture de son contrat de travail.

La Haute juridiction n’est pas du même avis et rappelle que dès lors que l’employeur n’avait pas contesté la régularité de la candidature du salarié devant le tribunal judiciaire dans le délai de forclusion de 15 jours, le caractère frauduleux de la candidature ne pouvait pas être caractérisé de sorte qu'il ne pouvait plus s'en prévaloir et que le salarié bénéficiait bien de la protection.

Cass.Soc., 18 octobre 2023, n°22-11.339 

  • Une mutation ne peut pas être imposée au salarié candidat

Après avoir été convoquée à un entretien préalable au licenciement en vue d'une sanction disciplinaire, une salariée s'était portée candidate aux élections professionnelles. Une mutation disciplinaire lui avait été finalement imposée, raison pour laquelle elle demandait la résiliation judiciaire de son contrat.

La Cour de cassation rappelle que l’employeur ne peut pas imposer de modification du contrat de travail ou de changement des conditions du travail à un salarié protégé sans son accord, quand bien même la candidature serait postérieure à la convocation à l’entretien préalable à la sanction disciplinaire.

Dès lors que l'employeur avait connaissance de la candidature de la salariée aux élections professionnelles au moment où il lui avait imposé une mutation, il commettait un manquement.

 Cass. Soc., 4 octobre 2023, n°22-12.922

4

Une photographie issue d'un compte Messenger est une preuve recevable

La Cour de cassation, dans deux arrêts rendus le 4 octobre 2023, vient rappeler sa jurisprudence antérieure selon laquelle une preuve obtenue de façon illicite peut être admise par le juge lorsque sa production est indispensable à l’exercice du droit à la preuve et est proportionnée au but recherché (Cass. Soc., 30 septembre 2020, n°19-12.058).

Pour justifier un licenciement, un employeur produisait des photographies privées montrant trois salariées, dont la salariée licenciée, posant en maillot de bain sur leur lieu de travail, extraites d'un groupe Messenger dont la salariée n'avait pas autorisé la diffusion.

Les échanges sur les réseaux sociaux démontraient également que la salariée participait à des soirées alcoolisées au sein du service.

La Cour de cassation confirme la décision des juges du fond qui avaient considéré que ces photos, ayant été prises sur le lieu de travail et à destination d’une ancienne collègue de travail, relevaient de la sphère professionnelle.

En tout état de cause, elle indique que la production des photographies extraites du compte Messenger portait, certes, atteinte à la vie privée de la salariée, mais était indispensable à l’exercice du droit à la preuve et proportionnée au but poursuivi (à savoir la défense de l’intérêt légitime de l’employeur à la protection des patients, dès lors que le litige concernait une infirmière). 

Cass. Soc., 4 octobre 2023, n°21-25.452 et n°22-18.217 

A noter, sur le même sujet, un arrêt du même jour dans lequel la Cour de cassation a précisé que pour pouvoir user d'une preuve illicite, l'employeur doit invoquer expressément dans son argumentaire que le rejet de celle-ci porterait atteinte au caractère équitable de la procédure, afin que les juges puissent procéder à la mise en balance du droit au respect à la vie privée et du droit à la preuve.

Cass. Soc., 4 octobre 2023, n°22-18.105

5

Index de l'égalité femmes/hommes : vers un nouvel index plus transparent et plus fiable

A l’issue de la conférence sociale du 16 octobre dernier, la Première ministre, Elisabeth Borne a annoncé l’ouverture d’une concertation pour réformer l’index de l'égalité professionnelle femmes/hommes afin de le rendre plus ambitieux, plus transparent et plus fiable.

Le seuil d'assujettissement de 50 salariés pourrait être modifié, de même qu'un indicateur sur les écarts de rémunération au sein des 10% des rémunérations les plus faibles pourrait être crée.

Ce projet s’inscrit dans le prolongement de l’adoption de la directive européenne sur la transparence salariale du 17 mai 2023, qui a pour objectif de renforcer l’application du principe de l’égalité des rémunérations entre les femmes et les hommes pour un même travail et qui imposera à compter du 7 juin 2026 la mise en œuvre d'un certain nombre de nouvelles formalités en la matière pour les entreprises. (Retrouvez notre article pour le magazine Tourmag à ce sujet ici)

Ce nouvel index devrait aboutir dans les 18 prochains mois.

Visioconférence

Notre prochaine visioconférence aura pour thème les actualités sociales et se déroulera le 16 novembre 2023 à 10 heures, en partenariat avec la CCI de Paris Ile-de-France.

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