Publication datée du : 12/10/2023

La News RH #101

La news RH
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#101 — 12 octobre 2023

1

Faute inexcusable : la rente n'indemnise pas le déficit fonctionnel permanent

Dans cette affaire, l’ayant droit d’une salariée décédée des suites d’une maladie professionnelle avait obtenu la reconnaissance d’une faute inexcusable de l’employeur ainsi que la réparation du préjudice causé par les souffrances physiques et morales endurées par la victime, outre le droit à une majoration de la rente versée par la CPAM au titre de la maladie professionnelle.

L'employeur avait formé un pourvoi en cassation.

L’employeur estimait qu'en l'absence de perte de gains professionnels ou d'incidence professionnelle, la rente majorée versée par la CPAM à la victime indemnisait déjà le déficit fonctionnel permanent (c'est à dire les souffrances endurées par la salariée dans le cadre de sa sphère personnelle - atteintes aux fonctions psychologiques et douleur permanente, la perte de qualité de vie et les troubles dans les conditions d'existence).

Dans ces conditions, il considérait que seuls les préjudices personnels non indemnisés par la rente ou l’indemnité pouvaient faire l'objet d'une demande distincte et que les juges d'appel n'avaient pas justifiés leur décision à cet égard.

La Cour de cassation, dans cet arrêt, vient toutefois rappeler et confirmer la position qu'elle a prise sur la question depuis son arrêt du 20 janvier 2023 selon lequel la rente ou l’indemnité en capital versée à la victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle ne répare pas le déficit fonctionnel permanent. (Cass. Soc., 20 janvier 2023, n°20-23.673)

En l’espèce, elle notait que la victime avait subi des souffrances morales du fait de sa perte d’autonomie jusqu’à son décès prématuré et la nature de sa pathologie, particulièrement douloureuse, ce qui justifiait qu'une indemnisation complémentaire lui soit versée.

Cette décision est à mettre en perspective avec le débat ouvert sur les changements envisagés par le projet de loi de financement de la sécurité sociale, dans les modalités de calcul de la rente versée aux victimes d'AT/MP et d'indemnisation de la faute inexcusable - Voir notre interview par TF1 Info ici.

Cass. 2ème Civ., 28 septembre 2023, n°21-25.690

2

Pas de requalification en CDI en cas de CDD succédant à un contrat de mission sans délai de carence 

Un salarié avait été mis à la disposition d’une entreprise utilisatrice du 7 septembre au 6 novembre 2015 suivant plusieurs contrats de mission temporaire, puis avait été engagé par un CDD, du 9 novembre 2015 au 12 février 2016.

Il demandait la requalification de son contrat en un contrat à durée indéterminée en raison du non-respect du délai de carence, tel que prévu par l’article L.1251-36 du Code du travail.

La Haute Juridiction rappelle toutefois qu'aucune disposition ne prévoit, dans une telle situation, la requalification du CDD en CDI, de sorte que celle-ci ne pouvait pas être octroyée au salarié demandeur.

Cass. Soc., 27 septembre 2023, n°21-21.154

3

Protection du lanceur d'alerte : le salarié n'a pas à agir de manière désintéressée

Un salarié avait été licencié pour faute grave après avoir signalé à son employeur des irrégularités relatives au non-respect de la réglementation des sociétés de sécurité.

Il revendiquait la protection au titre de lanceur d’alerte et demandait la nullité de son licenciement.

Dans deux courriers, le salarié avait indiqué que plusieurs affaires étaient traitées par différentes entités non habilitées à effectuer ces prestations, constituant ainsi un délit au sens du Code de la sécurité intérieure. A ce titre, il avait informé son employeur des démarches qu’il comptait entreprendre auprès du procureur de la République. 

L'employeur considérait au contraire que les conditions pour bénéficier de la protection du lanceur d'alerte n’étaient pas réunies puisque le salarié n’avait, selon lui, pas agi de manière désintéressée, sa période d’essai étant en cours de renouvellement.

La Cour de cassation rappelle toutefois que le salarié qui relate ou témoigne de faits constitutifs d’un délit ou d’un crime dont il aurait eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions n’est plus soumis à l’exigence d’agir de manière désintéressée au sens de l’article 6 de la loi du 9 décembre 2016 (dite Loi Sapin 2).

Depuis le 1er septembre 2022 en effet, la loi dite « Waserman »supprimé la condition liée au caractère désintéressé du lanceur d’alerte, ce dernier devant désormais simplement agir de bonne foi et sans contrepartie financière.

Cass. Soc., 13 septembre 2023, n°21-22.301

4

Des infractions au Code de la route commises avec un véhicule de fonction ne justifient pas toujours un licenciement disciplinaire

Pour mémoire, un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut justifier un licenciement disciplinaire que s’il constitue un manquement de l’intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail. 

En voici un exemple récent.

Dans cette affaire, un salarié avait été licencié pour faute en raison de diverses infractions au Code de la route commises avec un véhicule de fonction sur le trajet le menant à son lieu de travail.

La Cour de cassation approuve la décision de la Cour d’appel qui a jugé le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Plusieurs éléments avaient été retenus pour justifier cette décision :

  • les infractions avaient été commises durant les temps de trajet au cours desquels le salarié ne se tenait pas à la disposition de l’employeur ;
  • l’outil de travail n’avait subi aucun dommage ;
  • le comportement du salarié n’avait pas eu d’incidence sur les obligations découlant de son contrat de travail en sa qualité de mécanicien.

En conséquence, la Cour retient que « les infractions ne pouvaient être regardées comme une méconnaissance par l’intéressé de ses obligations découlant de son contrat, ni comme se rattachant à sa vie professionnelle. »

Cass. Soc., 4 octobre 2023, n°21-25.421

5

Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2024 a été présenté en Conseil des ministres le 27 septembre dernier. 

Les principales mesures prévues par ce projet sont les suivantes : 

  • Un renforcement des contrôles des arrêts maladies : afin de lutter contre les arrêts de travail injustifiés, le Gouvernement prévoit une suspension automatique du versement des indemnités journalières en cas d'arrêt injustifié constaté par le médecin contrôleur. A ce titre, le projet prévoit également l'encadrement de la prescription des arrêts de travail en téléconsultation à 3 jours en l'absence de rendez-vous physique avec le médecin.
  • La simplification de la procédure de l'abus de droit à disposition de l'URSSAF en cas de contrôle.
  • Le projet propose de définir les modalités de calcul de la rente AT-MP en tenant compte du préjudice économique subi d'une part et du préjudice fonctionnel permanent d'autre part. La faute inexcusable de l'employeur ne pourrait plus, par ailleurs, déclencher l'indemnisation que des préjudices avant consolidation.

Toutes les mesures de ce projet ne font pas l'unanimité.

Il conviendra de suivre avec attention les débats et les modifications opérées sur ce projet.

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