Publication datée du : 10/08/2023

La news Thema - Le harcèlement moral

La news Thema
"Le harcèlement moral"
#7 — 10 août 2023

 

 Avec 1 salarié sur 3 s'estimant victime de harcèlement, ces situations sont toujours délicates à gérer pour les employeurs et exposent à des risques non négligeables. Sans prétendre à l’exhaustivité, cette news Thema recense les dernières décisions et textes en la matière. Elle est préparée par nos équipes selon un calendrier adapté au rythme des actualités sociales.
 
Bonne lecture !

 

1

L'enquête interne

L’employeur n’a pas l’obligation d’associer les élus à l’enquête interne

Dans l'affaire soumise à la Cour de cassation, la question se posait de savoir si les élus doivent obligatoirement être associés au déroulement de l'enquête.

La réponse est non.

La Cour de cassation précise que l'enquête interne diligentée par l'employeur, confiée, non pas aux élus, mais à la direction des ressources humaines est un élément de preuve recevable. La Cour de cassation précise donc qu'il n'est pas obligatoire d'associer les élus à la mise en place d'une telle enquête.

Cass. soc. 1er juin 2022, n°20-22.058

Conduite de l’enquête

Dans cette affaire, un employeur avait confié une enquête relative à un harcèlement moral au supérieur direct de la salariée incriminée avec qui les difficultés relationnelles étaient connues.

Les membres du comité de direction avaient par ailleurs été informés qu'une mutation disciplinaire allait être proposée à la salariée avant même l’engagement de la procédure disciplinaire, et la nouvelle s'était ébruitée dans la société avant que cette dernière soit convoquée à un entretien.

La salariée incriminée, ayant ensuite été placée en arrêt de travail, a été déclarée inapte puis licenciée pour impossibilité de reclassement.

Pour la Cour de cassation, l'ensemble de ces éléments, ainsi que la mise en cause brutale de la salariée, qui avait une grande ancienneté et aucun antécédent disciplinaire, emportait la requalification nécessaire du licenciement en licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Cette affaire démontre la difficulté pour les employeurs de trouver le bon curseur entre réagir rapidement en cas de révélation de situations de harcèlement potentiel et ne pas agir de façon précipitée à l’égard de l’auteur des faits en cause.

Cass. soc., 6 juillet 2022, n° 21-13.631

2

Prescription des faits de harcèlement

Prise en compte de faits prescrits en cas de harcèlement moral

Un salarié licencié soutenait avoir subi un harcèlement moral à la suite de faits circonscrits à l'année 2005 puis de faits allant de 2013 à 2016.

La question se posait de savoir si ce salarié pouvait invoquer un fait prescrit pour justifier de l'existence d'un harcèlement moral.

La Cour de cassation juge que le salarié soutenait avoir été victime d'agissements de harcèlement moral jusqu'en 2016, ce dont il résultait que son action en indemnisation du harcèlement moral n'était pas prescrite dès lors qu’il avait saisi la juridiction prud'homale le 5 septembre 2016. Il appartenait dès lors à la cour d'appel d'analyser l'ensemble des faits invoqués par le salarié permettant de présumer l'existence d'un harcèlement moral, quelle que soit la date de leur commission.

Dans certaines circonstances, des faits, même prescrits, peuvent donc être invoqués par un salarié pour justifier une situation de harcèlement.

Cass. soc. 29 juin 2022, n°21-13.959

3

Rupture conventionnelle : risque de nullité en cas de harcèlement moral

Pour rappel, il est possible de conclure une rupture conventionnelle, y compris dans un contexte conflictuel, à condition qu'il n'existe pas de vice du consentement.

Dans un arrêt récent, la Cour de cassation rappelle que la violence morale résultant d’un harcèlement moral peut constituer un vice du consentement conduisant alors à la nullité de la rupture conventionnelle

Selon les situations, les juges pourront considérer qu'il s'agit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, voire nul.

Cass. soc. 1er mars 2023, n° 21-21.345

4

Dénonciation d’un harcèlement moral

Qualification des faits de harcèlement

La Cour de cassation avait précédemment adopté une position selon laquelle le salarié bénéficiait d’une protection contre le licenciement que s’il avait lui-même qualifié les faits de "harcèlement moral".

Dans cette affaire, la salariée avait dénoncé des faits sans précisément les qualifier de "harcèlement moral". Elle avait ensuite été licenciée pour faute grave.

Alors que précédemment, la Cour de cassation exigeait que le salarié qui demandait à bénéficier de ces dispositions protectrices ait expressément qualifié sa situation de "harcèlement", la Cour de cassation accepte désormais que le salarié soit protégé sans avoir indiqué ce terme.

Elle justifie cette nouvelle position plus souple de la manière suivante : "Dès lors que l’employeur a la faculté d’invoquer devant le juge, sans qu’il soit tenu d’en avoir fait mention au préalable dans la lettre de licenciement, la mauvaise foi du salarié […], le principe de l’égalité des armes conduit à permettre au salarié de se prévaloir […] de la protection contre le licenciement, quand bien même il n’aurait pas lui-même employé les mots "harcèlement moral" pour qualifier les faits dénoncés".

La Chambre sociale précise que cette solution ne s’applique que si l’employeur ne pouvait ignorer, à la lecture de l’écrit adressé par le salarié, ayant motivé son licenciement, que ce dernier dénonçait bien des agissements de harcèlement.

Cass soc, 19 avril 2023 n°21-21.053

Seule la mauvaise foi du salarié peut justifier un licenciement

Dans cette affaire, un salarié avait dénoncé des faits de harcèlement à son supérieur pour l’avertir et qu’il puisse prendre les mesures adéquates.

Il avait été licencié pour faute grave en raison de la tenue de propos injurieux, diffamatoires ou excessifs dans son courriel à l’encontre d’un membre de la Direction. Il avait alors saisi le conseil de prud'hommes d’une demande d’annulation de son licenciement.

La Cour de cassation a donné raison au salarié et rappelé que la mauvaise foi ne pouvait résulter que de la connaissance par le salarié de la fausseté des faits dénoncés.

En l’espèce, la Cour précise que la mauvaise foi ne pouvait être déduite de la situation exposée dès lors que le supérieur hiérarchique avait été informé de manière confidentielle et que le salarié souhaitait uniquement lui faire connaître la situation pour lui permettre, le cas échéant, de prendre les mesures adéquates.

Cass. soc. 15 février 2023, n° 21-20811

5

Réparation du harcèlement moral 

Un salarié licencié s’estimait avoir été victime de faits de harcèlement moral. Il avait alors saisi le conseil des prud’hommes pour obtenir la nullité de son licenciement. Il a, à cette occasion, sollicité diverses sommes au titre de la rupture de son contrat de travail ainsi que des dommages et intérêts pour harcèlement moral.

La Cour d’appel avait jugé le licenciement du salarié nul et lui avait octroyé une indemnité afférente. En revanche, les juges n’avaient pas fait droit à la demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral. Selon les juges du fond, le salarié ne pouvait pas prétendre aux deux indemnités car l’indemnité pour licenciement nul répare l’intégralité du préjudice.

La Cour de cassation juge cependant que l’octroi de l’indemnité pour licenciement nul ne fait pas obstacle à l’octroi de dommages et intérêts en réparation d’un harcèlement moral. Elle considère que le préjudice issu du harcèlement moral est distinct de celui né de la rupture du contrat de travail.

Cass soc, 1er juin 2023 n°21-23438

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Notre cabinet accompagne ses clients dans toutes les étapes de la relation contractuelle, et notamment en cas de situation de harcèlement moral. Nous pouvons vous accompagner dans la réalisation d'une enquête ou dans la construction de votre dossier. Nous intervenons également pour vérifier avec vous que les mesures de prévention ont été mises en place. 

N’hésitez pas à contacter les membres de notre équipe, nous serons ravies de vous aider.

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