Publication datée du : 09/06/2023

La news RH #84

La news RH
#84  — 9 juin 2023

1

La "mauvaise foi" du salarié protégé inapte face aux tentatives de reclassement de son employeur peut déboucher sur une autorisation de licencier pour motif disciplinaire

En principe, l'inaptitude empêche de licencier le salarié pour un autre motif.

Le Conseil d’État prévoit désormais une exception à ce principe lorsque le comportement du salarié empêche l’employeur de respecter son obligation de reclassement.

En l'espèce, une salariée protégée inapte avait refusé de se rendre aux rendez-vous organisés en vue de son reclassement.

Écartant le caractère d'ordre public de la procédure de licenciement pour inaptitude, le Conseil d'Etat a estimé qu'un employeur pouvait légalement envisager de licencier un salarié protégé déclaré inapte pour un autre motif que l'inaptitude, tel un motif disciplinaire, si ce salarié avait adopté un comportement qui le mettait dans l’impossibilité de s’acquitter de son obligation de reclassement.

Face à des obligations de reclassement très contraignantes pour les employeurs, tout n'est donc pas permis au salarié inapte.

Conseil d'Etat 12 avril 2023 n° 458974

2

Cumul d'indemnités en cas de harcèlement moral reconnu

Un salarié avait demandé en justice :

  • la nullité de son licenciement ;
  • diverses sommes au titre de la rupture de son contrat de travail, notamment l’indemnité due en cas de licenciement nul ;
  • des dommages et intérêts pour harcèlement moral.

Pour la cour d’appel, le salarié ne pouvait bénéficier que de l’indemnité pour licenciement nul dès lors qu'elle répare l'intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement.

Pour la Cour de cassation, le salarié peut cumuler le bénéfice de l’indemnité pour licenciement nul et des dommages et intérêts pour harcèlement moral.

La Cour de cassation suit ainsi le raisonnement du salarié en considérant que le préjudice subi pendant la période de harcèlement, au cours de l’exécution du contrat, est distinct de celui causé par le licenciement.

Cass. soc. 1er juin 2023, n° 21-23.438

3

Heures supplémentaires et charge de la preuve

Lorsqu’un litige sur l’existence ou le nombre d’heures de travail accomplies oppose le salarié et l’employeur, la charge de la preuve est partagée.

Un salarié avait été licencié et avait réclamé en justice le paiement d’heures supplémentaires qu’il prétendait avoir effectuées sur les 3 années précédant la rupture de son contrat de travail.

Pour ce faire, le salarié produisait des relevés de badgeage provenant du site où il était alors affecté pour une première période. Pour une seconde période, il soutenait également avoir travaillé selon un rythme de travail similaire sans apporter de pièces.

Les juges du fond avaient uniquement accordé au salarié un rappel d’heures supplémentaires pour la première période.

Or, la Cour de cassation souligne que pour la seconde période, le salarié avait demandé à l'employeur de lui communiquer pour les 3 dernières années les relevés de péage du badge mis à sa disposition, sans obtenir de réponse.

Par ailleurs, le salarié avait présenté des éléments suffisamment précis sur la première période pour permettre à l'employeur de répondre. Ce dernier ne produisait aucun élément de contrôle de la durée du travail, ce que l'employeur aurait dû faire puisqu'il doit produire les éléments correspondant au contrôle de la durée du travail que la réglementation met à sa charge.

La Cour de cassation casse l'arrêt de la cour d'appel qui avait fait reposer la charge de la preuve sur le salarié.

Cass. soc. 17 mai 2023, n° 22-11.592

4

Différence de rémunération fondée sur des diplômes et l'expérience professionnelle

Dans l’affaire soumise à la Cour de cassation, une salariée estimait avoir été lésée en comparaison avec un de ses collègues, alors qu'ils avaient été tous les deux embauchés en tant que technicien support à quelques semaines d'intervalle à des niveaux de rémunération différents. Puis, ils ont été promus au même moment dans l'emploi de coordinateur technique, avec la même classification et le même salaire.

Par la suite, son collègue avait bénéficié de plusieurs augmentations contrairement à la salariée, ce qui était justifié par l’employeur par l’existence de diplômes et des expériences professionnelles antérieures différents.

La Cour de cassation rappelle qu’au nom du principe d’égalité de traitement, "l'expérience professionnelle acquise auprès d'un précédent employeur ainsi que les diplômes ne peuvent justifier une différence de salaire qu'au moment de l'embauche et pour autant qu'ils sont en relation avec les exigences du poste et les responsabilités effectivement exercées".

Cass. soc. 24 mai 2023, n° 21-21.902

5

Protection de la santé et de la sécurité

Un salarié demandait en justice la condamnation de son employeur à lui verser des dommages et intérêts pour méconnaissance de son obligation légale de sécurité, fondée sur l’absence de mise en place d’un suivi annuel du temps de travail. 

Pour la Cour de cassation, le suivi de la charge de travail entre dans le champ de l’obligation de sécurité de l’employeur.

Or, l’employeur n’avait pas mis en œuvre d’entretiens annuels pour évoquer la charge de travail et son adéquation avec sa vie personnelle. En outre, le seul compte rendu d’entretien produit ne contenait aucune mention relative à la charge de travail. Partant, l'employeur avait bel et bien manqué à son obligation de sécurité et il aurait fallu vérifier si un préjudice en était résulté pour le salarié.

La Cour de cassation pose un principe général de suivi de la charge de travail pour chaque salarié au nom de la protection de la santé et de la sécurité. La question de savoir si ce principe vient évincer d’autres règles en matière de contrôle de la durée du travail (notamment en cas d’application d’horaires collectifs) reste en suspens.

Cass. soc. 13 avril 2023, n° 21-20.043

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