Publication datée du : 28/04/2023

La news RH #78

La news RH
#78 — 28 avril 2023

1

Protection des femmes souffrant de douleurs menstruelles, d’endométriose ou ayant subi une fausse couche

Une proposition de loi a été déposée au Sénat le 18 avril 2023 afin de permettre aux femmes concernées de bénéficier d’un arrêt de travail, d’un dispositif de télétravail, ou d’un congé payé (sous conditions).

La proposition de loi prévoit un arrêt de travail indemnisé pour les femmes souffrant de dysménorrhée (règles douloureuses) ou d’endométriose (maladie gynécologique inflammatoire et chronique).

Prescrit par un médecin ou une sage-femme, cet arrêt maladie d’une durée maximum de 2 jours par mois sur une durée de 3 mois permettrait à la salariée d’interrompre son travail chaque fois qu’elle se trouverait dans l’incapacité physique de travailler. La salariée ne subirait pas de perte de salaire : les IJSS maladie, qui lui seraient versées sans jour de carence, seraient par dérogation égales à la totalité des revenus d’activité antérieurs à la date de l’interruption du travail et soumis à cotisations (dans la limite d’un plafond).

La proposition de loi vise à favoriser la possibilité de télétravailler pour les femmes souffrant de douleurs menstruelles. 

La proposition de loi instaure également un congé payé, sur justification, pour les femmes affectées par une interruption spontanée de grossesse, pour une durée de 5 jours ouvrables (sauf dispositions conventionnelles plus favorables).

Retrouvez également l'interview d'Anne Leleu-Eté sur ce sujet.

2

La qualification des faits de harcèlement moral par le salarié n'est plus obligatoire

Pour rappel, tout licenciement d'un salarié ayant subi ou refusé de subir des agissements de harcèlement moral ou a témoigné / relaté de tels agissements est nul lorsqu'il est prononcé pour de tels motifs (sauf situation de mauvaise foi).

Alors que précédemment, la Cour de cassation exigeait que le salarié qui demandait à bénéficier de ces dispositions protectrices ait expressément qualifié sa situation de "harcèlement", la Cour de cassation accepte désormais que le salarié soit protégé sans avoir indiqué ce terme.

Elle justifie cette nouvelle position plus souple de la manière suivante : "Dès lors que l’employeur a la faculté d’invoquer devant le juge, sans qu’il soit tenu d’en avoir fait mention au préalable dans la lettre de licenciement, la mauvaise foi du salarié […], le principe de l’égalité des armes conduit à permettre au salarié de se prévaloir […] de la protection contre le licenciement, quand bien même il n’aurait pas lui-même employé les mots "harcèlement moral" pour qualifier les faits dénoncés".

La Chambre sociale précise que cette solution ne s’applique que si l’employeur ne pouvait ignorer, à la lecture de l’écrit adressé par le salarié, ayant motivé son licenciement, que ce dernier dénonçait bien des agissements de harcèlement.

Cela laisse inévitablement une grande liberté d'appréciation aux juges du fond sur ce qui devrait être compris, ou non, dans les écrits du salarié, et ainsi insécurise l'employeur.

Cass. soc., 19 avril 2023, n° 21-21.053

3

Inaptitude d’origine professionnelle : pas de droit à congés payés sur l’indemnité équivalente à l’indemnité compensatrice de préavis 

Dans le cadre d'un licenciement pour inaptitude professionnelle, le salarié a droit à diverses indemnités versées par son employeur, dont une indemnité compensatrice égale à l’indemnité compensatrice de préavis due en cas de licenciement.

Dans cette affaire, les juges d’appel avaient requalifié un licenciement pour inaptitude professionnelle en licenciement sans cause réelle et sérieuse et avaient condamné l’employeur à verser une indemnité correspondant à l'indemnité compensatrice de préavis outre les congés payés y afférents.

Sur pourvoi de l’employeur, la Cour rappelle encore une fois que l’indemnité compensatrice égale au préavis ne permet pas d’ouvrir des droits à congés payés.

Cass. soc. 29 mars 2023, n° 21-21.211

4

Irrecevabilité d'une preuve issue de la géolocalisation

Un chauffeur devait régulièrement découcher sur des lieux de chantier ou à proximité immédiate d’une « zone de confort » selon les consignes de l'employeur.

Constatant le non-respect de cette règle, l'employeur avait tout d'abord sanctionné le salarié par une mise à pied. 

Par la suite, l'employeur avait constaté que le salarié avait utilisé son véhicule de service pour se rendre quotidiennement au domicile de sa mère malade, alors qu’il connaissait l’interdiction d’utiliser le véhicule professionnel à titre personnel. L'employeur avait alors prononcé un licenciement pour faute grave.

La question posée à la Cour de cassation portait sur la recevabilité de la preuve, dès lors que l’employeur s’était appuyé sur les données issues de la géolocalisation du véhicule professionnel mis à la disposition du salarié, y compris celles collectées en dehors de son temps de travail.

La Cour de cassation rappelle que le juge doit vérifier si l'utilisation d'un élément de preuve porte atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble, en mettant en balance le droit au respect de la vie privée du salarié et le droit à la preuve. Or, ce droit à la preuve peut justifier la production d'éléments portant atteinte à la vie privée à deux conditions :

  • que cela soit indispensable à l'exercice du droit à la preuve ;
  • et que cette atteinte à la vie privée soit strictement proportionnée au but poursuivi.<
Le système de géolocalisation installé par l’employeur était destiné à la protection contre le vol et la vérification du kilométrage. Or, il l’avait utilisé pour surveiller le salarié et contrôler sa localisation en dehors de son temps de travail. L'employeur avait ainsi porté atteinte à sa vie privée et le moyen de preuve tiré de la géolocalisation était donc illicite. 

La Cour de cassation renvoie le dossier devant la cour d'appel qui devra rejuger si les sanctions prononcées étaient valables.

Cass. soc. 22 mars 2023, n° 21-24.729

5

Recevabilité de la preuve : l'employeur doit la demander expressément

Un conducteur scolaire utilisait le véhicule professionnel à des fins personnelles. Il s’était d’abord vu notifier un avertissement, avant d’être licencié compte tenu de la persistance de son comportement.

Dans cet arrêt, l’employeur avait utilisé les données issues de la géolocalisation alors qu'il :

  • n’avait pas informé le salarié de la mise en œuvre du système de géolocalisation, de la finalité poursuivie par ce système et des données collectées ;
  • aurait pu utiliser un autre moyen que la géolocalisation pour assurer le suivi du temps de travail de son personnel ;
  • n’aurait pas dû utiliser la géolocalisation pour contrôler le salarié en dehors des horaires et des jours de travail.

La Cour de cassation rappelle que l’utilisation de la géolocalisation pour assurer le contrôle de la durée du travail n'est licite que si ce contrôle ne peut pas être fait par un autre moyen et que la géolocalisation ne peut pas être utilisée pour localiser le conducteur en dehors du temps de travail.

En l’espèce, la géolocalisation avait permis un contrôle permanent du salarié, en collectant des données relatives à la localisation de son véhicule en dehors de ses horaires et de ses jours de travail. L'employeur portait atteinte à son droit à une vie personnelle de manière disproportionnée par rapport au but poursuivi.

Pour prétendre à l'examen de ce moyen de preuve, l’employeur aurait dû invoquer la recevabilité de la preuve obtenue illicitement devant les juges.

Cass. soc. 22 mars 2023, n° 21-22.852

Visioconférence : actualités sociales


 

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