Mutuelle d’entreprise : comment éviter le redressement URSSAF ?

Depuis le 1er janvier 2016, tous les salariés doivent avoir accès à une couverture minimale de prévoyance complémentaire en vue de couvrir les frais occasionnés par une maladie, une maternité ou un accident (article L. 911-7 du Code de la sécurité sociale). Ce régime de prévoyance est intitulé régime de « frais de santé » ou, dans le langage commun, régime de « mutuelle ».

Dans le cadre des formalités de création d'une entreprise, et lorsque celle-ci embauche son premier salarié, la mise en place d'un dispositif de mutuelle e     st l'un des points sur lequel nous alertons nos clients pour deux raisons majeures.

La première raison résulte des dispositions du droit du travail selon lesquelles l'employeur, qui ne propose pas de mutuelle à ses collaborateurs (ou qui propose un dispositif non conforme au socle minimal prévu par les textes), engage sa responsabilité vis-à-vis de ces derniers.

L'employeur s'expose alors, dans ce cadre, à des risques de condamnation devant le juge prud'homal qui peuvent aller d'une « simple » demande de dommages et intérêts en raison de la privation du bénéfice de la mutuelle ou du non-respect des obligations en matière de prévoyance’, à une demande plus conséquente de prise en charge de frais médicaux au motif que l’employeur n’a pas respecté son obligation légale de mettre en place une couverture santé minimale. Ces condamnations peuvent parfois atteindre plusieurs milliers d’euros.

La deuxième raison résulte de l’application des dispositions du code de la sécurité sociale.

Pour mémoire en effet, conformément à l’article L. 911-7 du Code de la sécurité sociale, il existe une obligation mise à la charge de l'employeur de financer à hauteur de 50% minimum le régime de mutuelle.

Cette contribution patronale peut être exonérée de cotisations sociales dès lors que sont respectées des conditions d'exemption liées :

  • Au caractère collectif du régime, qui doit ainsi être mis en place en faveur de l’ensemble du personnel de l’entreprise ou à une catégorie de personnes objectivement définie) ;
  • Au caractère obligatoire du régime, qui doit s’imposer à l’ensemble des salariés inclus dans le périmètre défini (sauf cas de dispense d’affiliation bien définis) ;
  • Et au respect des règles applicables en matière de « contrats responsables ».

L'instauration d'une mutuelle d'entreprise doit en outre respecter un formalisme strict. L'employeur doit en effet mettre en place le dispositif via un acte juridique bien précis, à savoir soit conclure un accord collectif, soit passer par la voie d’un référendum, ou encore, rédiger une décision unilatérale de l'employeur (la fameuse « DUE ») (Article L. 911-1 du Code de la sécurité sociale).

Le non-respect de ces conditions expose l'employeur à la remise en cause des avantages sociaux prévus par les textes.

En cas de contrôle Urssaf en effet, le contrôleur ou l'inspecteur chargé du contrôle a pour mission de vérifier si l'ensemble des conditions énumérées ci-dessus sont respectées. A défaut, il ne manquera pas de réintégrer, dans l'assiette de calcul des cotisations et contributions sociales, les montants versés par l’employeur au titre de la contribution patronale au régime complémentaire de frais de santé, et ce sur une période de 3 ans.

En pratique, l'organisme assureur devra proposer à l'employeur un dispositif conforme aux obligations en matière de contrat responsable.

L’on relève toutefois que rares sont les organismes assureurs qui préviennent leurs clients de leur obligation de respecter un certain nombre de formalités vis-à-vis de leurs salariés, autres que de leur transmettre les documents d'affiliation et d'information transmis par l'organisme lui-même.

Or, comme exposé supra, la bonne réalisation des formalités de mise en place du dispositif vis-à-vis des salariés est aussi importante que le contenu du dispositif en lui-même, de sorte que nombre d'entreprises se retrouvent exposées à des risques de redressement URSSAF, dont elles n'ont généralement même pas conscience.

Dès lors, comment limiter les risques de subir un redressement en cas de contrôle URSSAF ?

Avec un bon avocat, il est possible d’anticiper ce point !

Nous l'avons vu, le premier point de vigilance tiendra dans l’obligation qu’a l'employeur de s'assurer que les textes légaux et conventionnels qui s'appliquent à l’entreprise sont bien respectés (aussi bien en termes de formalisme que de contenu, à savoir de taux de cotisations prévu au contrat de type de garanties, de prestations proposées, de champ d'application / périmètre du dispositif, et ce pour chaque catégorie de salariés).

Ce premier travail de vérification est loin d’être inutile dès lors que nous rencontrons régulièrement, dans nos dossiers, des différences parfois non négligeables entre les dispositions conventionnelles applicables et les régimes mis en place.

Le second point de vigilance tiendra au dossier qui sera présenté au contrôleur ou à l'inspecteur en cas de contrôle URSSAF et qui devra comporter l’ensemble des documents exigés par les textes.

Ainsi, ce dossier sera complet uniquement si les documents et informations suivants peuvent être transmis à l'administration :

  • Les conditions générales ainsi que les conditions particulières du dispositif, outre le tableau des garanties pour chaque catégorie de salariés (en général, ces documents sont fournis par l'organisme assureur lors de l'affiliation au régime) ;
  • Le texte socle de mise en place du régime dans l'entreprise à savoir l'accord collectif, l'acte justifiant du référendum et de son résultat, ou la décision unilatérale de l'employeur. Attention, ce texte devra éventuellement être revu lorsque le contrat ou le régime sera modifié ;
  • Le courrier justifiant de la transmission de ces documents à chaque salarié, celui-ci devant être daté et signé par ces derniers ;
  • Enfin, en cas de dispenses d'affiliation, l'ensemble des documents exigés par la loi, par la convention collective ou bien par le texte socle (selon ses dispositions particulières), devront être transmis (demande du salarié, justificatif éventuel, réponse de l'employeur, etc.).

Si le dossier transmis à l'administration est complet, alors le risque de redressement URSSAF deviendra faible.

En revanche, en cas d'incomplétude du dossier, ou de non-conformité avec les exigences légales ou conventionnelles, alors le risque de redressement URSSAF sera d'autant plus fort.

Par principe, le redressement portera sur le montant global des contributions versées ou qui auraient dû être versées par les employeurs pour le financement de ces garanties. L’addition peut donc être salée…

Certes, les textes permettent aux cotisants de bénéficier d’une mesure de faveur consistant à limiter le redressement aux seuls collaborateurs dont la situation n’est pas conforme (soit parce que leur couverture ne respecte pas les critères liés au caractère collective et obligatoire, soit parce que l’employeur n’est pas en mesure de produire les justificatifs demandés par l’URSSAF).

Néanmoins, cette règle prévue à l’article L.133-4-8, II du Code de la sécurité sociale prévoit qu’il est possible de bénéficier d’un « redressement réduit » si l’employeur reconstitue, « de manière probante », les sommes faisant défaut. Tout sera donc une question d’appréciation des éléments transmis par l’employeur, ce qui peut donner lieu à des appréciations divergentes selon les cas…

En outre, bien que cette règle permette à l’employeur de limiter les montants engendrés par un redressement, il reste que les montants à régler sont le plus souvent élevés si les effectifs sont importants.

Il doit également être rappelé (et cela est également prévu par l’article L.133-4-8 du Code de la sécurité sociale) qu’en présence d’un redressement lié à l’absence de caractère collectif et obligatoire du régime, l’employeur ne peut pas demander aux salariés concernés le remboursement de la part salariale des cotisations redressées. (Article L.133-4-8 du Code de la sécurité sociale)

Nous assistons nos clients dans le cadre de la rédaction des accords collectifs d’entreprises ou DUE ou préparation des référendum nécessaires à la mise en place ou à la modification des régimes de mutuelle et de prévoyance.

     
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