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La loi du 2 août 2021 pour renforcer la prévention en santé au travail, aussi appelée « loi Santé », est enfin entrée en vigueur depuis le 31 mars 2022 (pour l’essentiel de ses dispositions).
Chronique publiée dans l’actualité actuEL RH à lire en cliquant sur le lien ci-après : https://www.actuel-rh.fr/content/le-document-unique-devaluation-des-risques-professionnels-quels-changements-depuis-la-loi ou bien à lire ci-après.
Parmi ses nombreuses mesures, plusieurs d'entre elles concernent le document unique d'évaluation des risques professionnels (« DUERP ») dont les changements font partie des plus emblématiques de cette loi. En plus des mesures prévues par la loi, un décret d'application du 18 mars 2022 vient réviser les modalités de mise à jour, de mise à disposition et de conservation du DUERP.
En quoi consistent ces changements ? À quel moment doivent-ils être mis en œuvre ? Nous faisons le point sur les six grandes mesures à retenir en la matière.
A compter du 31 mars 2022, le document unique devra, en plus de répertorier les risques professionnels auxquels les salariés sont exposés, assurer la « traçabilité collective de ces expositions ».
Cette première mesure est tout à fait en adéquation avec l'esprit du texte qui prévoit un renforcement des actions de prévention et également une meilleure traçabilité de l'exposition des salariés aux risques professionnels ; l'objectif étant ici de permettre à des salariés, plusieurs années après l'exposition à un risque, d’être en mesure de retrouver les données concernant l’exposition aux risques professionnels (type de risque, durée d’exposition, etc.) afin de déterminer, par exemple, les causes d'une éventuelle maladie qui surviendrait plusieurs années après l’exposition au risque.
Désormais, alors que l'obligation d'être doté d'un DUERP concerne toujours l'ensemble des entreprises quel que soit leur effectif, le document unique ne doit plus, depuis le 31 mars 2022, être mis à jour annuellement que par les entreprises d'au moins 11 salariés (article R.4121- 2 du code du travail).
En revanche, les deux autres hypothèses d'actualisation du document unique demeurent obligatoires pour l'ensemble des entreprises à savoir (i) en cas de décision d'aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail, ou (ii) lorsqu'une information supplémentaire intéressant l'évaluation d'un risque est portée à la connaissance de l'employeur. Sur ce dernier point, il conviendra d’ailleurs de noter un changement de formulation du texte qui imposait préalablement à l’employeur de mettre à jour le document unique en cas de « recueil » d’une information supplémentaire et non pas lorsqu’une telle information était « portée » à sa connaissance. Une telle modification est parfaitement conforme à la philosophie des textes dont l’objectif est d’élargir les actions de prévention de l’employeur en matière d'hygiène et de sécurité.
La mise à jour du document unique déclenchera l'obligation pour l'employeur de mettre à jour de manière simultanée le programme annuel de prévention des risques professionnels et d'amélioration des conditions de travail (PAPRIPACT) pour les entreprises d'au moins 50 salariés, ou la liste des actions de prévention consignés dans le document unique pour les entreprises de moins de 50 salariés (nouvelle formalité prévue par la loi santé- article L.4121- 3-1 du code du travail). Le décret du 18 mars 2022 précise néanmoins que cette mise à jour devra être effectuée à chaque mise à jour du document unique « si nécessaire » (article R.4121-2 du code du travail).
Pour mémoire, la loi Santé avait remodelé les modalités de mise à disposition du document unique en précisant qu'il devrait être tenu à la disposition « des travailleurs, des anciens travailleurs ainsi que de toute personne ou instance pouvant justifier d'un intérêt à y avoir accès », la liste de ces personnes et instances devant être fixées par décret (article L.4121- 3- 1 du code du travail). L'article R.4121-4 du code du travail prévoit désormais que ce document et ses versions antérieures doivent être tenus à la disposition (i) des salariés et des anciens salariés pour les seules versions en vigueur durant leur période de présence dans l'entreprise, et (ii) de l'ensemble du service de prévention et de santé au travail (« SPST »).
De telles dispositions ouvrent dès lors l'accès au document unique à des personnes appartenant au SPST qui, jusqu'à présent, ne pouvaient pas en être récipiendaires en l’absence de qualité de professionnels de santé, comme, par exemple les intervenants en prévention des risques professionnels, les ergonomes, les toxicologues, etc.).
Le DUERP restera évidemment accessible, dans toutes ses versions, aux personnes précédemment visées par les textes, c'est à dire les élus du CSE, les agents de l'inspection du travail, des services de prévention des organismes de sécurité sociale, des organismes professionnels de santé et de sécurité de branches et des inspecteurs de la radioprotection.
Par ailleurs, concernant l'obligation de transmission aux salariés et anciens salariés, il doit être noté que la communication des versions du document unique antérieures à celle en vigueur à la date de leur demande pourra être limitée aux seuls éléments afférents à leur activité.
Cette mise à disposition élargie du DUERP ne s'applique qu’aux versions successives du document unique en vigueur au 31 mars 2022 ou élaborées à compter de cette date.
Enfin, il doit être noté qu’aux termes de l’article L.4121-3-1 du code du travail, le DUERP doit désormais non plus être mis à disposition mais transmis, ainsi que ses mises à jour successives, au SPST.
Il est désormais prévu une conservation des versions successives du document unique pendant une durée d'au moins 40 ans à compter de leur élaboration (article R. 4121- 4 du code du travail).
Dans ce cadre, le document unique et ses mises à jour devront faire l'objet d'un dépôt dématérialisé sur un portail numérique, selon un calendrier progressif : à compter du 1er juillet 2023 pour les entreprises d'au moins 150 salariés et à compter du 1er juillet 2024 au plus tard pour les entreprises de moins de 150 salariés (un décret est encore attendu pour fixer les dates d'application de ces dispositions).
À noter également que l'obligation de conserver les versions successives du document unique s'applique dès le 31 mars 2022 pour les versions en vigueur à compter de cette date. Dans l'attente de l'effectivité du portail numérique (à cet égard, un décret du 5 avril 2002 vient tout juste de définir le cahier des charges du déploiement et du fonctionnement de ce portail dont la date butoir de déploiement a été fixée au 31 mai 2022), les entreprises devront conserver le DUERP et ses versions successives sous format papier ou dématérialisé (article R. 4121-4 du code du travail).
Dernière mesure et non des moindres, à compter du 31 mars 2022, le comité social et économique devra être consulté sur le DUERP et ses mises à jour (article L.4121-3 du Code du travail). Jusqu'à présent, il ne s'agissait pas d'une obligation (cette problématique ayant été tranchée par la chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt du 12 mai 2021 n°20-17.288 à propos d'une mise à jour dans le cadre de la pandémie de Covid-19).
Dans les entreprises d'au moins 50 salariés, l'employeur devra présenter au CSE le programme de prévention dans le cadre de la consultation sur la politique sociale de l'entreprise, les conditions de travail et l'emploi (en l'absence d'accord collectif en disposant autrement) et, nouveauté, les CSE des entreprises de moins de 50 salariés devront bénéficier d'une présentation de la liste des actions de prévention et de protection (articles L.2312-5 et L.2312-27 du code du travail).
Avec toutes ces nouvelles mesures, le DUERP, qui avait été remis sur le devant de la scène avec la pandémie de Covid-19, risque de susciter de nouvelles interrogations dans les prochains mois. A n’en pas douter, l’ensemble de ces dispositions marque bien la volonté du législateur de changement profond de culture en matière de santé et sécurité en entreprise.